Dans cette affaire, les psychanalystes, dont je suis, sont restés à la traîne, mais leurs contributions n’ont pas été inutiles. Et les guerres de religions restent décidément stériles. Donc, dans la Loire, depuis 1994, je m’applique à aller à la rencontre de ces enfants autistes, devenus adultes au fil des années. J’essaie de comprendre, de m’impliquer, d’inventer des stratagèmes de communication facilitant les échanges. L’approche proposée par la méthode TEACCH s’est avérée d’une grande utilité.Par un curieux concours de circonstances, je me suis retrouvé en 2015 dans ce centre pour enfants autistes de Vientiane, avec la mission d’assurer la formation du personnel à l’accompagnement de ces enfants. Première surprise : la méthode TEACCH était connue et considérée comme un outil précieux. Deuxième surprise : les éducatrices et enseignantes (que des femmes) étaient très investies dans leur tâche et désireuses de progresser. Il ne me restait plus qu’à faire au Laos ce que je faisais dans la Loire.
C’est ainsi que depuis lors, chaque année, je suis allé, accompagné par une complice spécialiste de la question, à Vientiane et ensuite aussi à Pakse et bientôt à Champasak pour assurer la remise à niveau des connaissances et des compétences déjà bien affirmées. En pratique, que faisons nous ? Nous intervenons en fait à tous les niveaux. D’abord nous assistons au travail des éducatrices et nous observons leurs méthodes. Puis nous recevons les équipes, en groupe ou individuellement pour étudier une difficulté qu’elles souhaitent nous soumettre. Le plus souvent, ces rencontres ont lieu en présence de l’enfant concerné et avec sa participation. Nous recevons aussi les familles qui le souhaitent pour examiner les problèmes rencontrés. Nous allons aussi dans les établissements scolaires dans l’intention de répondre autant que possible aux interrogations des enseignants. Enfin, en clôture de la semaine de travail dans l’établissement, nous organisons un atelier avec toutes les personnes qui le souhaitent, parfois cinquante personnes, enfants inclus, autour d’une question choisie par l’équipe pédagogique. Cet atelier comporte des mises en situation, des jeux de rôles, des exposés, des échanges divers… Tout ceci serait irréalisable bien sûr, sans le soutien constant et précieux de Manivanh qui accomplit là bien plus qu’un travail d’interprète.
Donc dans ces missions de formation au sein des établissements pour enfants autistes, nous n’hésitons pas à mettre la main à la pâte, à nous impliquer concrètement dans les situations qui se présentent. Il est vrai que nous n’avons pas de médicaments à proposer, pas d’instrument à manipuler. Nous exerçons à mains nues. Et avec les petits autistes laotiens, nous avons à franchir la même barrière du langage qu’avec nos petits autistes ligériens. Il demeure que l’autisme, ça ne se soigne pas. Il n’est pas interdit en revanche d’aider les personnes autistes par un accompagnement attentif et respectueux, en leur proposant notamment des outils de communication adaptés. C’est pourquoi, dans nos missions, impliqués à chaque instant dans la recherche un « terrain d’entente », nous sommes bien plus libres d’agir à notre guise.
Jacques Vazeille
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